Des galipettes entre les lignes

Chroniques littéraires.

16 avril 2014

Aux frontières de la soif

Mars_Aux frontieres de la soifRoman de Kettly Mars.

En janvier 2010, la terre a tremblé à Haïti, renversant des maisons, broyant des familles, ruinant des avenirs. Sur le sol meurtri de l’île, une fleur tentaculaire a poussé : Canaan est un bidonville qui abrite des centaines de milliers de réfugiés et rassemble tous les visages de la misère. Ici, tout manque, les soins, la nourriture et surtout l’eau. « Tout le monde doit vivre, les choix étaient serrés, il fallait chacun inventer son pire. C’est la vie même qui est dure. » (p. 95) C’est là que Fito, urbaniste et écrivain en panne d’inspiration, vient perdre ses vendredis, sous une tente où se présentent timidement des fillettes effrayées. Fito est effaré et écœuré par les urgences sensorielles qui fouaillent son bas-ventre, mais il est incapable d’y résister et c’est à Canaan qu’il tente d’étancher ses sombres désirs. « Ici la compassion a un prix, c’est du business. » (p. 38) Arrive Tatsumi, journaliste japonaise avec laquelle Fito a communiqué par messagerie virtuelle. Troublé par la sylphide nippone, Fito voudrait échapper à ses démons. Tatsumi, native d’une île que les séismes n’épargnent pas, saura-t-elle le sauver de son tremblement intérieur ?

Entre les chapitres qui présentent Fito et ses errements intimes, il y a des voix d’enfants qui parlent de malheur, de solitude et de vie sordide. Elles sont autant de parenthèses graciles qui résonnent au milieu du fracas de l’après-séisme. Seules ces pages ont éveillé mon intérêt qui a rapidement été mis à mal devant les atermoiements de Fito. L’homme n’a pas su m’émouvoir et sa détresse me semble surtout être un prétexte pour se livrer au pire. Quant à Tatsumi, il me semble qu’elle a été insérée de force dans cette histoire tant j’ai eu des difficultés à comprendre son personnage et ses interactions avec les autres protagonistes. Aux frontières de la soif me laisse la bouche sèche, avide d’un texte plus frais et d’un style moins terne.

Lecture dans le cadre du Prix Océans 2014.

Posté par Lili Galipette à 08:00 - Ma Réserve - Lignes d'affrontement [12] - Permalien [#]
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Commentaires sur Aux frontières de la soif

  • C'est dommage, le sujet pouvait attirer.

    Posté par Lydia B, 16 avril 2014 à 09:30 | | Répondre
  • Je suis dedans. J'en ressors pour le moment un côté sordide qui ne me convient pas du tout.

    Posté par Miss Alfie, 16 avril 2014 à 14:24 | | Répondre
  • Beaucoup beaucoup de mal à rédiger ma chronique... Tu dis tellement mieux que moi ce que je ressens également...

    Posté par Miss Alfie, 18 avril 2014 à 14:47 | | Répondre
  • Je suis surprise de ne pas avoir déclenché de l'urticaire géant au cours de cette lecture tant il y a un côté malsain excusé dans cette histoire.
    Il me reste ma chronique à rédiger, je sens que je ne vais pas être tendre ... .

    Posté par MissG, 28 avril 2014 à 13:36 | | Répondre
    • Surprenant comme les avis se rejoignent sur ce livre !

      Posté par Lili Galipette, 28 avril 2014 à 17:58 | | Répondre
  • Et troisième déception pour cette dernière sélection du Prix Océans ... je ne sais vraiment pas pour qui voter franchement. Celui-ci est carrément inabouti.

    Posté par missbouquinaix, 06 mai 2014 à 12:27 | | Répondre
    • Pour ma part, j'ai choisi le roman de Marie Darrieussecq.

      Posté par Lili Galipette, 06 mai 2014 à 12:53 | | Répondre
      • C'est sûrement le choix que je vais faire aussi au final ...

        Posté par missbouquinaix, 06 mai 2014 à 15:31 | | Répondre
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