20 janvier 2017
Le goût du bonheur - Tome 1 : Gabrielle
Chaque été, la famille Miller passe de belles semaines sur l’île d’Orléans pour fuir la chaleur de Québec. La belle Gabrielle s’occupe avec attention de ses enfants. « On ne peut pas mourir quand on a une maman comme toi. Parce que tu prends beaucoup soin de nous. » (p. 131) Adélaïde, Fabien, Béatrice, Rose et Guillaume grandissent entourés d’amour, chéris par leur père Edward, leur tante Germaine et le reste de la famille. La jeune Adélaïde retrouve avec bonheur son ami Florent, fils de la domestique. Georgina, la sœur de Gabrielle, rejoint la famille avec ses filles Reine et Isabelle. Quand la crise de 1929 frappe le monde, Edward et les siens sont à l’abri du besoin, mais le mari de Georgina est ruiné et cette dernière vient s’installer à Québec avec ses filles pour bénéficier du soutien de Gabrielle et Germaine et trouver un mari à son aînée.
Éblouissante de beauté, Gabrielle n’a d’yeux que pour son époux qui l’aime tout autant. « Edward est une telle évidence d’amour pour elle, un compagnon si nécessaire que jamais, dans aucune lutte, devant aucune adversité, elle ne le laisserait seul pour faire face. » (p. 102) Le couple est solide et soudé dans toutes les batailles et la folle admiration de Nic, un ami d’Edward, pour Gabrielle ne représente aucun danger. Il n’en est pas de même pas du jeu de séduction opéré par Kitty, la sœur de Nic, auprès d’Edward. Chez les Miller, la porte reste toujours ouverte aux proches et aux nécessiteux et Gabrielle est la générosité incarnée. Elle accueille Isabelle et prend soin de Florent frappé de tuberculose. Elle milite aussi pour le vote des femmes et ouvre un centre pour accueillir les enfants pauvres. « J’aimerais ça qu’à ma mort, mes filles n’aient pas un goût acide dans la bouche et l’envie de faire éclater les murs d’une maison qui s’est tenue trop tranquille. J’aimerais ça qu’il y ait moins de différence entre elles et moi qu’entre moi et ma mère. » (p. 92) Les années passent et les enfants grandissent. Les bonheurs et les peines émaillent la vie des Miller alors que le sinistre spectre de la guerre plane en Europe.
Si un vent de changement frémit doucement au-dessus du Québec, l’emprise religieuse est encore très puissante et tous les comportements sont jugés et jaugés à l’aune d’une stricte morale catholique. Gabrielle, bien que moderne par bien des aspects, reste une femme très pieuse, presque superstitieuse. « Elle a cette peur idiote que Dieu guette si on est suffisamment reconnaissant de ses bienfaits et que, à défaut, Il nous les arrachera sauvagement. » (p. 324) Le désir et le plaisir sont complètement tabous et il n’y a que dans l’intimité que Gabrielle révèle sa nature amoureuse. Dans ce premier tome qui se conclut tragiquement pour celle qui lui donne son nom et son titre, Marie Laberge ouvre une fresque familiale passionnante et foisonnante qui met en valeur la belle ville de Québec.
Commentaires sur Le goût du bonheur - Tome 1 : Gabrielle
- Ho comme je suis d'accord avec ce billet et ce livre que j'ai adoré, comme le reste de la trilogie !
Je n'imaginais pas une seconde l'impact que la religion pouvait avoir dans la vie des femmes à cette époque ! On comprend la fin tragique de ce premier tome en lisant le deuxième mais quand même , j'étais bouleversée ! Trop forte Marie Laberge...
- Alors, pas "Le goût du bonheur", parce que c'est très romanesque et pas représentatif de son œuvre.
Essaie "Quelques adieux" : http://www.desgalipettesentreleslignes.fr/archives/2016/09/23/34292760.html
Ou "Ceux qui restent" : http://www.desgalipettesentreleslignes.fr/archives/2016/04/29/33549764.html
Ou "Juillet" ou "Annabelle".
- Gabrielle n'est pas si parfaite, elle s'interroge beaucoup, notamment sur sa foi et les manquements de l'église. C'est un personnage qui m'a beaucoup touché parce qu'il est évident qu'il n'a aucun avenir dans le monde qui s'en vient, c'est une relique vivante. Sa soeur Germaine et plus pragmatique : bien qu'elle ait des idées dépassées, elle est capable d'affronter la nouveauté et de ne pas se laisser démonter.
J'ai lu "Annabelle" et "Juillet" quand j'habitais au Québec et j'en garde un souvenir très fort.