Des galipettes entre les lignes

Chroniques littéraires.

07 février 2020

L'âge de la lumière

Scharer_Age de la lumiereRoman de Whitney Scharer.

Lee Miller est jeune. Elle est belle. Les objectifs l’adorent. Mais elle veut passer derrière. Loin de son Amérique natale, elle espère réaliser son rêve dans le Paris de 1929. « Lors de son premier été à Paris, elle ne connaissait pas encore le pouvoir des photos, la façon dont un cadre crée une réalité, dont une photographie devient un souvenir qui devient vérité. » (p. 28) Sa rencontre avec Man Ray est décisive. L’artiste devient son maître, son amant. Lee devient son assistante et sa muse. Le couple côtoie Paul Eluard, Pablo Picasso, Jean Cocteau, Salvador Dali et tout ce que Paris compte d’artistes et d’intellectuels surréalistes. Les années passent et la jeune Américaine se forme. « Lee observe toutes ces vies autour d’elle et commence à redevenir elle-même – ou à devenir elle-même, pour la première fois. Ses paupières sont comme l’obturateur d’un appareil photo ; quand elle cligne des yeux, un mouvement, une image s’impriment dans son esprit. De temps à autre, une de ces images mérite d’être conservée, de sorte qu’elle la fixe sur la pellicule. Toutes les photos qu’elle prend ainsi semblent vivantes et inattendues. Et Lee elle-même se sent plus vivante que jamais du seul fait de les prendre. » (p. 366) Devenue reporter de guerre, à Buchenwald, elle perd une part d’elle-même. « Il y a matière à photos partout où se pose le regard, des compositions d’horreurs. » (p. 147) Plus de 30 ans après sa rencontre avec Man Ray, elle ne sait quoi faire quand on lui propose de relancer sa carrière de journaliste en écrivant un long portrait de son ancien amant. « Le sujet, c’est Man Ray / Justement pas, pense Lee. Et ça a toujours été le problème. » (p. 28 & 29)

Dans ce roman historique, l’autrice présente la relation intense et dévorante entre l’artiste déjà renommé et celle que l’histoire aurait pu oublier, tant le premier s’est approprié le travail de la seconde. Whitney Scharer joue sur les deux faces de la photographie, entre art et reportage, qui sont deux formes de vérité. « L’un après l’autre, les correspondants de presse. Lee reste. Elle doit porter témoignage. Elle a les poches remplies de boîtes de pellicule, de grenades à envoyer pour publication. » (p. 290) Le récit est très bien rythmé et très agréable à lire. Peut-être un peu trop romancé à mon goût, mais je pinaille : le roman offre un beau portrait d’une artiste.

Posté par Lili Galipette à 08:00 - Mon Alexandrie - Lignes d'affrontement [6] - Permalien [#]

Commentaires sur L'âge de la lumière

  • Intéressant ! Je me le note.

    Posté par Lydia B, 09 février 2020 à 15:58 | | Répondre
  • Pour toi et David qui aimez la photographie, ça peut en effet être une belle lecture.

    Posté par Lili Galipette, 10 février 2020 à 07:46 | | Répondre
  • Celui-ci, je tourne encore autour. J'avoue que je crains ce " trop romancé " ou le parti-pris, mais très tentée quand même !

    Posté par Marilyne, 19 février 2020 à 17:08 | | Répondre
  • Vous avez parfaitement le droit de pinailler, mais en effet le parti pris, c'est justement le roman et non la biographie. Cela étant dit, puis-je vous demander à l'avenir de citer les traducteurs des livres dont vous parlez, a fortiori de ceux que vous aimez. C'est l'usage et même plus que ça, c'est exigé des journalistes en général. Mais surtout, il faut n'avoir aucune idée du travail que représente la traduction d'un livre pour oublier les traducteurs. J'insiste, il ne s'agit pas de parler de la traduction, nous n'en demandons pas tant, mais simplement, de les citer. Merci d'avance pour toute la profession.

    Posté par Sophie Bastide-F, 10 mars 2020 à 09:34 | | Répondre
    • Bonjour, merci pour votre message.
      J'essaierai à l'avenir d'y penser, mais je me permets de préciser que je ne suis pas journaliste. Simple blogueuse. Bonne journée.

      Posté par Lili Galipette, 10 mars 2020 à 09:58 | | Répondre
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